030. Quitter le mouillage

Sur la route des Monts Koghis, lundi 20 octobre à 9 heures

Certaines personnes aiment la pluie – du moins prétendent aimer la pluie. Moi-même, j’avoue, il m’est arrivé de dire sans réfléchir, accompagnant mes mots d’un sourire niais : « J’aime la pluie ». En réfléchissant, on réalise cependant qu’on ne peut pas aimer la pluie, et ce pour une raison très simple : la pluie mouille. Elle trempe, elle rend moite, elle rend sale, elle rend triste, elle fait moisir, elle fait puer, elle gâche tout, elle inonde mes matins, elle provoque des maladies, elle noie, elle tue. La pluie a collaboré avec les Allemands en 1940, elle a voté Le Pen au deuxième tour en 2002, elle a voté pour Magalie Vaé lors de la finale de la Star Ac’ 5 en 2005… La pluie est tellement nuisible qu’elle a poussé l’Homme à se réfugier dans des cavernes pour en taguer les murs, à maîtriser le feu pour mieux détruire l’environnement, à faire l’amour bien à l’abri pour mieux propager les maladies vénériennes, à inventer la télévision pour mieux aliéner les individus et asservir les masses… J’entends d’ici les contradicteurs :

« Oui mais la pluie ça permet aux plantes et aux arbres de pousser et sans pluie on n’aurait rien à manger… » – Oui d’accord c’est sûr, la pluie est nécessaire, mais en aucune façon plaisante. Le purin joue un rôle de même nature, et pourtant peu de gens se vantent d’aimer le purin.

« Oui mais la pluie c’est beau et ça peut faire des arcs-en-ciel. » – Ah oui ? Eh ben moi alors j’aime bien les bombes atomiques parce que ça fait des jolis champignons dans le ciel.

« Oui mais la pluie c’est bien parfois ça rafraîchit… » – Oui voilà : la pluie c’est bien parfois, de temps en temps, sans en abuser, pas tous les jours quoi.

Parce que bon, nous avions tout préparé comme des pros, nous avions lu les guides, nous avions compulsé compulsivement les statistiques météorologiques, et il était acquis qu’octobre était le mois le moins pluvieux en Nouvelle-Calédonie. Du coup, nous avions emprunté une vieille tente à nos cousins – [oui, la maîtrise de l’orthographe peut engendrer des joies simples] – et nous avions prévu de camper quatre nuits à l’Île des Pins, un petit paradis de sable blanc et de lagons turquoises. Sauf que voilà, après deux nuits sous la pluie dans une tente imparfaitement étanche, le cœur n’y était plus, alors nous sommes rentrés à Nouméa avec un jour d’avance. C’est chiant les vacances.


Sur l’Île des Pins, lorsqu’il ne pleut pas










1 commentaire:

Twistan a dit…

On avait eu un jour de soleil sur deux lors de ce fameux weekend à l’ile des pins. Je comprends donc ton amertume :

-la piscine naturelle semble beaucoup moins turquoise quand les eaux limpides reflètent un ciel sombre,
-l’inévitable sortie en pirogue devient très vite pénible quand le vent souffle sur ton corps trempé par de grosses gouttes (effet déodorant).
Tu oublis tout de même la vertu suprême de la pluie : « Elle sait détremper le gazon du terrain de foot. Elle te permet alors de lâcher des gros tacles sans te relever avec des genoux déchirés ».
Il faut éviter d’être d’humeur barométrique…
Facile à dire quand on passe à coté du cliché carte postale !
=-)